Prens Dimitri Cantemir
ARTICLES

LE PRINCE DIMITRI CANTEMIR (1673 – 1723)

( par Namık Sinan Turan )

Dimitrie Cantemir est né en 1673 à Silisteni. Il est le fils de Constantin Cantemir, le gouverneur de la Moldavie qui a été classifiée comme un état privilégié dans le système administratif Ottoman. Quand son père, venant d'une famille villageoise modeste, a été élu gouverneur par les boïars Moldaves, la vie de Cantemir est entrée dans une nouvelle période. Il a appris le grec et le latin chez le moine Yeremiye Kakavelas. Le jeune Cantemir s'est instruit dans la philosophie et la littérature et il est admis par l'intelligentsia de l’époque. Lorsque sa première tentative politique a échoué (aussi bien que la dernière), il est vénu à Istanbul où il passerait une grande partie de sa vie.

Dans cette ville, où il a vécu jusqu'à 1710, il poursuivit ses études dans le Palais Ottoman aussi bien que dans le Patriarcat Grec. Pendant ce temps-là, Cantemir a eu un large cercle de connaissances et d’enseignants avec lesquels il a fait ses études. Les premiers noms qui viennent à l’esprit incluent Meletius d'Arta, le philosophe et le géographe, Nefioğlu, son professeur d’arabe et Esad Efendi d'Ioannina, son professeur des mathématiques et de turc. On sait qu'il était très doué pour l’apprentissage des langues et il a appris plusieurs langues orientales. Il a aussi appris les subtilités de la musique de l'est chez Kemani Ahmet Efendi.

Cantemir est bientôt devenu une personnalité très recherchée par les cercles artistiques d'Istanbul. Ayant participé avec les unités Moldaves des forces Ottomanes à la guerre de Zenta, Cantemir a été nommé gouverneur de la Moldavie pendant la guerre contre les Russes qui a commencé en 1710.

Lors de sa période de gouverneur, en poursuivant un rêve pour lequel la réalité politique n'était pas encore mûre, il est entré dans la collaboration avec les Russes en 1710. La déception de ce rêve en Prusse en 1711, prépare la scène de la dernière période dramatique de sa vie. Il est mort le 21 août 1723, l’homme réputé, pas seulement pour sa personnalité politique qui s’est formée dans les conditions uniques de sa période, mais aussi pour sa culture profonde.

Mais ce qui le distingue historiquement c’est le fait qu'il a transcrit beaucoup de morceaux musicaux, et contribué ainsi à la connaissance de l'Est en Europe. Les écritures de Cantemir sur l'Est ont atteint le deuxième plus grand public après les études écrites par Paul Rycaut sur l’histoire Ottomane publiées en 1668 à Londres. Son travail écrit en Latin Médiéval, était le premier traité systématique sur l'État Ottoman. Dans son livre, Incrementa atque decrementa Aulae ot homanicaet, il a préconisé une nouvelle approche à la philosophie de l’histoire et a porté l'attention au fait que la naissance et l’éffondrement des états suivent un cours naturel parallèle à celui de toute créature. Ainsi il suggéré que les états suivent les périodes universelles de l’épanouissement et du déclin.

À la suite des contributions de Prince Cantemir comme orientaliste, il a été élu membre de la Société Scientifique de Berlin le 11 juin 1714. Nous lisons, sur l'enregistrement écrit pour son adhésion, les phrases suivantes: "résidant à Istanbul depuis vingt ans, il a appris les langues orientales, écrit des poèmes au style turc, composé les oeuvres musicales et a gagné l'estime du Sultan, du Vizir et d'autres hauts gradés."

Un autre aspect de l'historien Cantemir qui le caractérise comme l’homme de culture, est sa passion pour la musique de l'est ainsi que ses oeuvres musicales. Dans le dictionnaire musical, intitulé Historisch-biographische der Tonkünstler, publié en 1790 par Ernest Gerber, son nom est mentionné avec l’indication de l'importance de ses travaux sur la musique. Il a hérité son talent musical de son père Constantin, qui, pendant son temps libre, lui jouait des chansons folkloriques Moldaves avec la flûte. Dimitrie a transmis son amour pour la musique à ses enfants aussi. Sa fille aînée, Maria, a joué du clavecin et son fils Antioche était un chanteur à Moscou et a composé plusieurs travaux.

D’après nos connaissances actuelles, le premier maître dont il a appris les concepts de base de la musique, a été Crétois Kakavelas qui était lui-même un compositeur. Son talent musical a été remarqué non seulement par ses enseignants mais par tout le monde qui le connaît. Donc quand il a visité l'ambassadeur polonais Raphael Leszczynski, ce dernier a bien remarqué le talent musical de jeune Cantemir. Le fait qu’il a poursuivi, à İstanbul, ses études sur la musique orientale pendant quinze ans sous la direction de Kemani Ahmed, est une indication claire de son niveau d'intérêt pour la musique de l’Est.

En même temps, il a pris des leçons chez Anjeliki, célèbre compositeur et joueur de tanbur.

Cantemir a composé trente-six pièces de musique y compris deux “peşrev”, onze “saz semaisi”, deux “aksak semai” et un “beste”. Quand le Sultan Ahmet II l'a nommé gouverneur de la Moldavie, il a composé un “semai” dans le “makam” Neva dévoué au Sultan et a reçu de nombreux cadeaux et récompenses. Parmi les travaux attribués à Cantemir il y a un Mevlevi “ayini” qui a été exécuté par les derviches du Galata Mevlevihanesi et qui a été l’objet d’éternelles discussions pendant son temps. Le moine Toderini prétend que ce morceau a été écrit par Cantemir sous l'influence de l’ancienne littérature turque et composé conformément aux règles et au style des exemples qui se trouvaient dans la possession du M. Ferriol, l’Ambassadeur de France en Turquie. La composition a été notée dans le système de notation européenne. Un autre musicologue, Georges Brezaul, qui a cru que l' “ayin” a été écrit par Cantemir, est arrivé à cette conclusion en y trouvant les traces des mélodies Moldaves. Selon le même auteur, le “Mevlevi ayin” a influencé la musique de l’un des opéras de Mozart, l'Enlèvement au Sérail. Il semble que Mozart est mis au courant du “Mevlevi ayini”, par F.J. Sulzer, qui a enregistré ce rite dans son histoire. Cette vue est partagée aussi par d'autres historiens roumains. En fait, M. de Ferriol, croyait que cette musique a été composée par Sieur Chabert, qui était “un grand maître de musique” et qui avait établi les principes de base de cet art. Mais cette prétention n’a pas été assez soutenable. M. de Ferriol, qui s’intéressait beaucoup à la culture orientale, a demandé au musicien Chabert de noter ce rite des dervishes tournants. De la même façon il avait demandé au peintre Vanmour d’en faire le tableau qui est actuellement exposée au Musée National d’Amsterdam. Il est tout à fait possible que Cantemir, qui connaissait M. de Ferriol et qui avait en même temps un intérêt profond pour la musique de l'est, ait des relations avec l'ambassade française à Istanbul et qu’il ait bien aidé Chabert.

En considérant comment s’est établie la tradition de maître/apprenti dans l’Empire Ottoman, l'acceptation de Cantemir comme enseignant de musique au-delà du royaume de la théorie, est significante. Parmi ses étudiants se trouvaient le directeur-trésorier de l'Empire, İsmail Davut Efendi et trésorier du Palais, Latif Çelebi. Parmis ses autres étudiants nous pouvons citer Taşçıoğlu, Sinik Mehmet, Bardakçı Mehmet Çelebi et Ralaki Eupragiotes, un jeune noble grec. Apparemment indifférent à la musique occidentale, Cantemir prétend que le mètre et la proportion de mots dans la musique turque sont plus parfaits que dans la musique européenne. Inspiré par ces pensées et probablement la motivation de ses proches amis, il écrit un livre sur la théorie de la musique turque.

Le livre est écrit en 1700 et connu comme “Kantemiroğlu Edvarı”. Le titre entier du livre dévoué au Sultan Ahmet II, est “Kitab-ı İlm-i Musiki ala Vech-i Hurufat (Livre de la science de musique à travers les lettres). Le livre est composé de deux volumes principaux. Le premier volume contient des renseignements techniques sur le “makam”, les intervalles et l’ “usul”. Le deuxième volume contient la notation de 316 peşrev, presque 40 saz semaisi et quelques beste composés dans quarante-huit “makam” aux 16ème et 17ème siècles.

En prenant comme sa base, le tanbur, considéré comme instrument standard de la musique turque, le livre résume les principes théoriques via l'échelle principale,et à la structure théorique ainsi atteint, il ajoute de nouveaux principes théoriques fondamentaux. Avec cette approche, le livre est un point tournant dans la théorie turque. La théorie de Cantemir, qui est fondée sur la méthode expérimentale “kavl-i cedid” ou “kavl-i hakir”, est en conflit avec la théorie traditionnelle. Dans l'opinion de Popescu-Judetz, la nouvelle théorie est le contraire de la théorie abstraite plus ancienne qui avait été systématisée par les autorités musicales du Moyen Age. L’étude de Cantémir, qui a dirigé les sujets selon une classification logique tant spécifiquement que généralement, est une comparaison de deux côtés, comme son approche. En comparant d'une part les éléments de musique avec ceux de la langue au moyen d'une comparaison linguistique, d’autre part , il fait une comparaison en disséquant son objet en parties de la manière appliquée par la science médicale.

Cantémir différe par son approche, des premiers chercheurs sur la théorie incluants Mahmud b. Abdülaziz, Seydi et Bedr-i Dilsad. Ses prédécesseurs considérent la musique Ottomane comme une continuation de la tradition musicale Islamique et construisent leurs théories sur cette compréhension. Dans son livre, Cantemir essaye de s’approcher de la musique Ottomane comme une école en soi-même. En plus, la mise d’un bon nombre de musiques en notation qu'il a conçue lui-même, a évité la perte de ces morceaux par les ravages du temps.

Il est clair que le livre “Kitab-ı İlm-i Musiki ala Vech-i Hurufat (Livre de la science de musique à travers les lettres) a éveillé beaucoup d’intérêt dans les cercles de musique Ottomane. On sait aussi que son système de notation était populaire parmi les compositeurs. Bien qu'il dise: “j'entends dire que mon travail reste populaire parmi les turcs qui veulent apprendre la musique”, le moine Gian Battista Toderini écrit dans son étude “Letteratura turchesca” que pendant son séjour à Istanbul, il était extrêmement difficile de trouver un exemplaire du livre de Cantémir. Selon le même auteur, la théorie turque était difficile, les Turcs n'ont pas utilisé la notation de Cantemir et ils ont continué à composer avec les “usul” anciens.

Pourtant nous savons qu’il y avait des musiciens qui n'ont pas été d'accord avec lui. Par exemple, Abdülbaki Dede, le cheik des dervishes du Galata Mevlevihanesi, qui a écrit les études telles que “Tahkik ve Tetkik” et “Tahririye”, a utilisé trente-huit symboles qui sont différents des lettres utilisées par Cantemir, et pourtant les valeurs qu'il a utilisées étaient identiques à celles assignées aux lettres par le Prince Moldave. De nombreuses discussions sur les revendications de Cioranesco dans sa recherche complète sur le sujet mises de côté, "Cantemir a fait une contribution importante à la théorie sur les problèmes de durée et d'intervalles lesquelles etaient utilisés par les musiciens de son temps, il a trouvé sa solution dans l'échelle conçue par Werckmeister en 1691 et avec le clavicorde bien-modéré découverte par Bach, qui a approuvé la solution de Werckmeister." C’est pour cette raison qu’une grande attention lui a été portée pendant la période suite à son étude.

Cantemir a subi un coup sérieux de ses efforts politiques infructueux mais il est resté actif dans la musique jusqu'à la fin de sa vie. Selon une chronique historique écrite en 1743 par Molla Hacı Abdülgaffar de Crimée, Le Prince Cantémir, prenant refuge en Russie après l'échec prussien, avait mené avec lui l’un de ses “beste segah” (musique composée dans l’usul “segah”); il l’a joué et a chanté. Pendant la période qu’il a passé au service de Tsar Peter, Cantemir a toujours continué ses travaux musicaux. Peter était un passionné de la musique, il aimait chanter les hymnes d'église, et il amenait avec lui un choeur composé de presque vingt personnes, lors de ses voyages. Il envoyait souvent les étudiants à l'étranger pour qu’ils gagnent de l’expérience et reçoivent une bonne éducation. À ce point il a joué un rôle important dans la vie de Cantemir, qui avait une large connaissance de Slave et la maîtrise de la langue grecque et de la musique. Il a traduit les lithurgies Byzantines pour l'Église Orthodoxe russe. En plus, il a conçu un instrument qui ressemblait au "mikyas-i savta" (le monoaccord) développé par les théoriciens de la musique turcs pour repérer les intervalles de ton corrects.

Selon certaines sources, il a écrit un autre morceau de musique turque pendant cette période, qui a été perdue dans un naufrage dans la Mer Caspienne; pourtant il n'y a aucune évidence historique solide qui soutient cette revendication.

*Dr., Faculté d’Economie de l’Université d’Istanbul, Département de Science Politique et de Relations internationales

1 Cantemir, qui est d'abord venu à Istanbul dans 1688, a vécu ici jusqu'à 1691. Il est venu pour la deuxième fois après 1693.

1 Pour les renseignements sur sa vie, voir Mihai Maxime, "Haraciul moldovenesch dans l'opéra lui Dimitrie Cantemir", Analele Universitatii Bucuresti. Filosofie Istorie Drept, XXII, Bucuresti 1974, s.70-77, aussi, "Dimitrie Cantemir", md. DIA., Istanbul 2001, c.24, s.320-322

1 Defterdar Sarı Mehmet Paşa, Zubde-i Vekaiyât, haz. Abdülakadir Özcan, TTK. Yay., Ankara 1995, s.41

1 Dimitrie Cantemir, Osmanlı Imparatorluğunun Yükseliş ve Çöküş Tarihi, Cumhuriyet Yay., Istanbul 2000, c. I-II

1 Konuyla ilgili bir değerlendirme için bkz. Türkkaya Ataöv, "Osmanli Tarihçisi Dimitrie Cantemir 1673-1723", SBFD., Ankara 1973, c.28, no.1-2, s.205-208

1 Georges Cioranesco, "Dimitrie Kantemir'in Doğubilim Araştırmalarına Katkısı", trad. Zeki Arıkan, Ulusal Kültür, Ankara 1979, sa.3, s. 19

1 Cioranesco, age., s.21-22

1 Ismail Baha Sürelsan, "Cantemiroglu ve Türk Musikisi", Dimitrie Cantemir, Unesco Türkiye Milli Komitesi, Ankara 1975, s.78

1 Teorisi hakkinda genis bilgi için bkz. Eugenia Popescu-Judetz, "Dimitrie Cantemir Musiki", md. DIA., Istanbul 2001, c.24, s.322 vd.

1 Eugenia Popescu-Judetz, 18. Yüzyil Musiki Yazmalarindan Kevseri Mecmuasi Üstüne Karsilastirmali Bir Inceleme, çev. Bülent Aksoy, Pan Yay., Istanbul 1998

1 Sürelsan, age., s.80

1 Cioranesco, age., s.23-24

1Le livre qui est un important matériel historique est traduit en turc par Yalçın Tura. voir Kitâbu Ilmi'l-musiki 'alâ vechi'l-hurâfât: Musikiyi Harflerle Tesbit ve Icra Ilminin Kitabi, YKY., Istanbul 2001, c. I-II
1 voir Popescu-Judetz, Prens Dimitrie Cantemir..., s. 31-32

*Dr., Faculté d’Economie de l’Université d’Istanbul, Département de Science Politique et de Relations internationales

1 Cantemir, qui est d'abord venu à Istanbul dans 1688, a vécu ici jusqu'à 1691. Il est venu pour la deuxième fois après 1693.

1 Pour les renseignements sur sa vie, voir Mihai Maxime, "Haraciul moldovenesch dans l'opéra lui Dimitrie Cantemir", Analele Universitatii Bucuresti. Filosofie Istorie Drept, XXII, Bucuresti 1974, s.70-77, aussi, "Dimitrie Cantemir", md. DIA., Istanbul 2001, c.24, s.320-322

1 Defterdar Sarı Mehmet Paşa, Zubde-i Vekaiyât, haz. Abdülakadir Özcan, TTK. Yay., Ankara 1995, s.41

1 Dimitrie Cantemir, Osmanlı Imparatorluğunun Yükseliş ve Çöküş Tarihi, Cumhuriyet Yay., Istanbul 2000, c. I-II

1 voir Türkkaya Ataöv, "Osmanli Tarihçisi Dimitrie Cantemir 1673-1723", SBFD., Ankara 1973, c.28, no.1-2, s.205-208

1 Georges Cioranesco, "Dimitrie Kantemir'in Doğubilim Araştırmalarına Katkısı", trad. Zeki Arıkan, Ulusal Kültür, Ankara 1979, sa.3, s. 19

1 Cioranesco, age., s.21-22

1 Ismail Baha Sürelsan, "Cantemiroglu ve Türk Musikisi", Dimitrie Cantemir, Unesco Türkiye Milli Komitesi, Ankara 1975, s.78

1 voir Eugenia Popescu-Judetz, "Dimitrie Cantemir Musiki", md. DIA., Istanbul 2001, c.24, s.322 vd.

1 Eugenia Popescu-Judetz, 18. Yüzyil Musiki Yazmalarindan Kevseri Mecmuasi Üstüne Karsilastirmali Bir Inceleme, çev. Bülent Aksoy, Pan Yay., Istanbul 1998

1 Sürelsan, age., s.80

1 Cioranesco, age., s.23-24

1Le livre qui est un important matériel historique est traduit en turc par Yalçın Tura. voir Kitâbu Ilmi'l-musiki 'alâ vechi'l-hurâfât: Musikiyi Harflerle Tesbit ve Icra Ilminin Kitabi, YKY., Istanbul 2001, c. I-II
1 bu konuda voir Popescu-Judetz, Prens Dimitrie Cantemir..., s. 31-32